“Vigilance” est le mot d’ordre qui s’impose, aujourd’hui, aux entreprises, dans un contexte économique fragilisé par une forte inflation. Il s’agit, selon Mohamed Louzir, secrétaire général de la Chambre de commerce et d’industrie tuniso-française (Ccitf), d’un exercice de funambule où l’entreprise doit réussir le pari de concilier entre ses équilibres financiers et une gestion des prix qui tient compte du pouvoir d’achat laminé des consommateurs.
Rencontré en marge du séminaire, organisé récemment par la Ccitf sur le thème “Loi de finances 2024 : quel impact sur l’entreprise?”, le secrétaire général de la Chambre, Mohamed Louzir, a souligné, dans une déclaration à La Presse, les défis auxquels sont confrontées les entreprises établies en Tunisie. Fortement tributaires de leur environnement opérationnel, les PME sont aujourd’hui appelées, plus que jamais, à faire preuve de vigilance. Et pour cause: un accès toujours difficile au crédit et des finances publiques souffrant de déséquilibres chroniques.
Une loi de finances qui déçoit les attentes ?
“Une entreprise vit dans son environnement. On est dans une économie où l’inflation et les taux d’intérêt stagnent à des niveaux élevés et où l’accès au crédit n’est pas aussi facile parce que l’Etat est en train de s’endetter auprès des entreprises publiques pour payer un déficit budgétaire de près de 10 milliards de dinars”, a-t-il commenté.
Or la L.F 2024, étant une loi de finances de rigueur, n’a pas apporté de remèdes significatifs à cette situation difficile dont souffrent les entreprises. “Il est évident que la L.F de cette année est une loi de finances de rigueur où il n’y a pas véritablement beaucoup de mesures au profit des entreprises, mis à part quelques dispositions en faveur des très petites entreprises ou des entreprises communautaires. En dehors de cela, les entreprises ne bénéficient pas d’avantages importants.
Bien sûr il y a quelques mesures introduites au profit de l’économie verte, circulaire ou bleue. Mais les entreprises tunisiennes doivent pouvoir dégager 44 milliards de recettes fiscales, en 2024”, a-t-il ajouté. Il a, en ce sens, expliqué que les entreprises qui doivent, de ce fait, passer à la caisse, vont devoir gérer convenablement leurs marchés et leurs prix, tout en tenant compte du pouvoir d’achat limité des consommateurs.
Selon Louzir, la Tunisie qui a fait le choix de maintenir le système de subvention, doit décaisser 11 milliards de dinars au titre des subventions, une somme, selon ses dires, supérieure à toutes les aides que l’Etat peut apporter aux nécessiteux. Il a, en outre, ajouté que le faible investissement, qui persiste depuis des années comme un facteur chronique, affaiblirait la croissance. “L’entreprise doit être vigilante.
Elle doit aller chercher des marchés à l’export, c’est une solution qui va lui permettre de réaliser de la croissance puisque le marché tunisien est un peu exigu”, a-t-il poursuivi.
Des entreprises qui tirent le diable par la queue
Interrogé au sujet de la faillite des PME en Tunisie, le secrétaire général de la Ccitf a affirmé que beaucoup d’entreprises, qui doivent être, conformément au code des sociétés commerciales, en faillite technique, continuent aujourd’hui, à fonctionner soulignant, dans ce même contexte, les difficultés par lesquelles passent aujourd’hui ces entreprises.
“Quand vous allez dans les tribunaux pour faire le constat des entreprises en faillite, vous ne trouvez pas un nombre très important. Par contre, celles qui ont d’énormes difficultés à fonctionner normalement, leur chiffre est important”, a-t-il commenté.
Par ailleurs, Louzir a, en somme, fait savoir que les investisseurs français ont toujours confiance dans le site Tunisie “parce que les avantages compétitifs de la Tunisie sont importants”. Selon ses dires, ce capital confiance peut être renforcé, surtout pour les investisseurs qui ne sont pas familiers avec la Tunisie et qui ont des idées préconçues sur son climat des affaires.
De son côté, Mongi Djellouli, directeur au cabinet d’audit et de consulting Deloitte, a rappelé les principales mesures en rapport direct avec l’entreprise. Il s’agit essentiellement d’avantages fiscaux, à savoir l’exonération d’impôt pendant une période de 4 ans, suite à la création d’une nouvelle entreprise.
Il a également mentionné le dégrèvement financier pour les entreprises, les avantages accordés aux souscripteurs qui vont financer des start-up ou d’autres secteurs et l’amnistie fiscale. A rappeler, dans ce cadre, que la LF 2024 a prévu cinq types d’amnistie fiscale. La première concerne les contrôles fiscaux, permettant au contribuable de bénéficier de l’abattement des pénalités de retard. Les autres amnisties couvrent le défaut de déclaration, la taxe foncière (aussi bien pour les personnes physiques que les personnes morales) et le paiement des vignettes automobiles.